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Wall Street Journal, The Economist,
Financial Times. Depuis quelques mois, la presse
financière regorge d'encarts publicitaires vantant les mérites écologiques
des géants du pétrole. Chevron annonce la fin du tout au pétrole. Shell
décline le gaz liquéfié à la sauce bourgeois bohème. BP se raconte solaire.
Bref, le Protocole de Kyoto visant à réduire les émissions de gaz à effet de
serre serait au centre des préoccupations de l'industrie pétrolière.
Préoccupations réelles face au réchauffement climatique ou slogan de
marketing? La faiblesse des montants alloués par les compagnies à la
recherche et au développement (R & D) d'énergies alternatives révèle une
stratégie avant tout axée sur la communication. Même si les initiatives de BP
et de Shell (solaire, hydrogène, éoliennes) sont reconnues par les
écologistes.
«Les sommes dédiées aux projets renouvelables ne dépassent pas 1% du total
des investissements pour les groupes les plus avancés, tels BP et Shell»,
estime François Perrin, analyste en développement durable chez LODH à Genève.
En 2004, les dépenses d'investissement dans le pétrole (exploration,
extraction, raffinage, etc.) ont atteint 15 milliards de dollars chez Shell,
16 milliards chez BP et 20 milliards chez Exxon (XOM). «A ma connaissance, Exxon n'a aucun projet
dans les énergies renouvelables», précise Natacha Guerdat,
analyste au sein de la même équipe chez LODH. Le groupe américain axe
principalement ses recherches sur la mise au point d'essences et liquides
raffinés pauvres en rejets polluants.
En fait, les budgets «durables» des compagnies pétrolières n'ont pas
progressé de manière significative. Les projets ont généralement été lancés
au début des années 2000 et coïncident avec l'intensification de leur
communication verte. «Ces campagnes de marketing se sont renforcées depuis
deux ans», ajoute François Perrin.
Les compagnies chercheraient avant tout à améliorer leur image. Cette dernière a
souffert au rythme des marées noires provoquées par les tankers (Erika,
Prestige) et des dénonciations pour corruption ou pollution dans les pays en
voie de développement (Nigeria, Equateur).
Fait nouveau, les groupes ciblent aujourd'hui moins les consommateurs que les
investisseurs. «Le soleil, le vent, l'hydrogène permettent à des compagnies
pétrolières d'apparaître plus propres, plus douces, et ils donnent aux fonds
d'investissement éthiques des motifs de les y inclure. Activité marginale du
groupe en termes comptables, BP Solar est connu
comme un des principaux producteurs d'équipements pour l'énergie solaire, ce
qui lui fait marquer beaucoup de points à «l'éthicomètre»,
souligne une note d'Antoine Mach, cofondateur de l'agence de cotation éthique Covalence à Genève. «Cela
permet aussi de maîtriser les technologies du futur», tempère Natacha Guerdat.
Ces stratégies à destination des financiers passent par une visibilité
accrue. «Les agences de notation (ndlr: qui
décident de la composition des indices) sont très sensibles aux stratégies de
communication», affirme François Perrin. Et cela fonctionne. «BP et Shell
figurent parmi les vingt titres préférés des fonds éthiques», observe Antoine Mach.
Ces dernières années, les pétroliers se sont retrouvés sous forte pression. «Sur
185 résolutions d'actionnaires religieux et sociaux annoncées pour 2004, le
thème du réchauffement climatique arrive en première position»,
souligne-t-il. En définitive, la multiplication des pages publicitaires constitue
un moyen d'attirer des investisseurs de plus en plus sensibles aux critères
environnementaux et sociaux.
Aucune fibre écologique chez les pétroliers? Pas forcément. En 2004, BP a
débloqué une somme de 350 millions de dollars sur cinq ans pour financer un
programme sur la réduction d'émissions nocives et l'efficience énergétique. Mais,
là aussi, le budget peine à convaincre. «Ce montant est largement insuffisant
pour lutter contre les 100 000 à 150 000 tonnes de gaz carbonique relâchées
annuellement par chacune des majors lors de l'exploration, la production ou
le raffinage», relève François Perrin.
Et le spécialiste de conclure, pas dupe: «Les incitations réglementaires sont
déterminantes pour convaincre les géants pétroliers de se positionner dans
les énergies alternatives, en attendant les premières réalisations
opérationnelles de séquestration du carbone à l'horizon 2020 (lire
ci-dessous).»
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Les exemples chinois et européen
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Les lois d'incitation sont primordiales
pour les énergies alternatives.
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Nicolas
Pinguely
Le prix du pétrole a explosé depuis 2001. Le cours du baril a été multiplié
par trois à près de 70 dollars. Aujourd'hui, la cherté du brut permet aux
énergies renouvelables de gagner en crédibilité. Mais les investissements
des firmes pétrolières dans le solaire et l'éolien ne décollent pas.
Ces derniers privilégient plutôt un retour à 20 ou 30 dollars du cours du
brut. Une baisse envisageable ces prochaines années. En effet, si les
réserves de brut ne sont pas éternelles, elles ne sont pas épuisées pour
autant. Dès lors, l'adoption de lois d'incitation reste primordiale pour le
développement de l'éolien ou du solaire. D'autant que le charbon ou les
sables bitumeux canadiens représentent aussi des alternatives, certes
polluantes, au pétrole. Et que, demain, les processus de séquestration du
gaz carbonique rendront les énergies fossiles à nouveau fréquentables.
Ces techniques consistent à injecter les rejets de carbone dans des poches
vides de pétrole ou de gaz pour réduire les émissions de gaz à effet de
serre. «Les incitations réglementaires sont essentielles pour soutenir le
positionnement des groupes pétroliers dans les énergies vertes», souligne
Natacha Guerdat, analyste en développement
durable chez LODH.
La directive européenne et la position chinoise vont dans le bon sens. Dans
l'Union européenne, 12% de la consommation d'énergie devra provenir d'une
source durable d'ici à 2010, contre 3% aujourd'hui. Pékin s'est fixé un objectif analogue: 10% à l'horizon 2020.
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